Une observation qui nous préoccupe profondément est la façon dont les êtres humains mettent des étiquettes sur les individus et les situations ET ce qui les conduit à les décoller. La pratique de l’étiquetage est une fonction de base importante de notre mode de fonctionnement. Nous sommes construits pour étiqueter afin que notre esprit conserve les traces de ce qu’il vit sans dépenser trop d’énergie. Si vous n’avez pas fait le tri entre « ceci » et « cela », vous ferez face à davantage d’incertitude et de peur, or notre cerveau n’aime pas la peur.
Nous collons des étiquettes sur les personnes pour définir qui fait partie de notre « tribu » et qui n’en fait pas partie. Cet instinct nous aide à nous sentir en sécurité dans les groupes que nous avons identifiés comme « bons » et à éviter les groupes identifiés comme porteurs d’une menace.
Considérer chaque personne et chaque situation sans préjugé représente un important effort. Si nous ne sommes pas vigilants, le collage d’étiquettes au quotidien devient un mode de fonctionnement standard qui conduit à mettre les personnes et les situations dans des boîtes. Sans réflexion, nos pensées ressemblent alors à :
- « Il est difficile de travailler avec cette personne. Il faut que je fasse attention. »
- « Ce projet est trop ambitieux, cela ne fonctionnera pas. »
- « Il pense comme je pense. On va bien s’entendre. »
Coller des étiquettes est un comportement classique des rôles de Victime, Persécuteur et Sauveteur du triangle dramatique de Karpman, car ces trois rôles sont guidés notamment par la peur. Pour la contrôler ou tenter de l’atténuer, l’étiquetage permet de créer des catégories et ainsi de penser disposer d’une plus grande chance de prédire ce qui va se passer, ou d’évaluer ce qui s’est passé.
Un collègue, familier des rôles du triangle de Karpman, s’est récemment senti victimisé et démuni vis-à-vis d’une situation professionnelle. Il a étiqueté l’un de ses collègues en tant que Persécuteur et responsable de sa situation. Cela lui a permis de « justifier » son comportement de rejet et d’évitement de son collègue.
Cette façon de procéder a fonctionné un temps, mais petit à petit, il admit que cette catégorisation en tant que Persécuteur n’amenait rien. Au contraire, la situation avait empiré et l’environnement de travail était devenu tellement mauvais qu’il s’est décidé à réfléchir différemment.
Il prit les mesures pour décoller les étiquettes de ceux qu’il considérait comme étant « son problème » et procéda de la façon suivante :
- Il reconnut de lui-même les dégâts causés par ses préjugés, sa faible écoute à l’égard des autres et son mode de communication,
- Il admit que le rôle de Créateur de TED* – The Empowerment Dynamic qui était en lui recherchait l’apaisement et la réconciliation, plus que son égo qui cherchait à avoir raison,
- Il accepta qu’il n’eût pas de pouvoir sur les autres et qu’il ne puisse pas les changer, mais qu’il pût choisir et adapter sa réponse à leur égard et aux situations rencontrées,
- Il déclara que, même si les autres n’étaient pas toujours agréables, il resterait poli,
- Il décida d’observer cette situation du point de vue du Challenger en se demandant comment apprendre de celle-ci et progresser, même si les choses n’étaient pas alignées sur ses désirs,
- Il rapporta que le plus grand bond en avant vint lorsqu’il se demanda lui-même « qu’est-ce que je veux vraiment ? ». Sa réponse émergea rapidement. Il déclara « je veux identifier et contribuer à notre but commun ».
L’étiquetage d’individus est un mécanisme de défense qui alimente le triangle dramatique de Karpman. En décollant les étiquettes que nous avons collées et en considérant les autres comme des Créateurs de plein droit, nous pouvons construire des relations sources de coopération et de co-création.